jeudi 25 juillet 2019

Vieilles Charrues 2019

C'est carnaval ! Les organisateurs du festival breton ont eu du flair en choisissant ce thème pour la 28ème édition des Vieilles Charrues. Parce que la déco forcément festive et colorée, parce que les festivaliers déguisés en arlequin, licorne, tigrou, majorette, marquise, cônes de signalisation, Casa Del Papel, et tant d'autres. Enfin, parce que la programmation cette année fût plus que jamais variée voire déstabilisante : de Bror Gunnar Jansson à Booba, de Jane Birkin à Aya Nakamura, de Columbine à Iggy Pop, de Vald à Etienne De Crecy. De quoi rajeunir brutalement la moyenne d'âge des spectateurs tout en essayant de garder les fidèles des premières années.

Notre sélection de concerts sur ces 4 jours de Vieilles Charrues.
Camélia Jordana, Hubert Lenoir, Balthazar, Bror Gunnar Jansson, Namdose, Flavien Berger, Nile Rodgers  Chic, Clara Luciani, Gainsbourg Symphonique avec Jane Birkin, Soadaj', Razorlight, Tears For Fears, Iggy Pop, Alice Merton, Lalala Napoli, Vendredi Sur Mer, Georgio, Mnnqns, Black Eyed Peas, BCUC, Hubert Félix Thiéfaine, Tamino, Nakhane, Parcels.


JEUDI : Gwernig a la tête qui tourne

Camelia Jordana ouvre cette édition 2019 devant un public encore un peu timide. Elle étrenne par la même occasion la nouvelle scène Kerouac, plus grande, plus haute et avec avancée. La chanteuse présente son nouvel album Lost, un bel ouvrage de world musique mêlant textes arabes, français et anglais. J'ai bien aimé Gangster, le poignant Inch Allah et Dhaouw. Ça commence en douceur mais ça commence plutôt bien.


Je pars sur Grall pour le concert de Hubert Lenoir. Look androgyne, voix féminine, bondissant aux quatre coins de la scène (et même au dessus), le Québécois a assuré un show plein d’énergie entouré de ses six musicien·ne·s. Tantôt langoureux (Recommencer) ou punchy (Fille De Personne, Sucre Et Sel), Hubert Lenoir m'a rappelé un peu Jad Wio et sa fleur de métal. Rien que pour ça, merci !

 

Les nombreux adolescents amassés contre les barrières du premier rang pendant Balthazar sont là pour Columbine qui passera dans deux heures. Ils auront au moins eu le plaisir de découvrir les Belges, encore une fois impeccables (Balthazar vu à Beauregard il y a deux semaines). Il est bien difficile de trouver des défauts à ce groupe si talentueux.

 

Je file ensuite sur Gwernig pour Bror Gunnar Jansson que je souhaitais revoir dans des conditions plus intime que lors du festival normand. Vœu exaucé puisque les organisateurs des Charrues ont eu la bonne idée de proposer aujourd'hui une scène Rock 360° sous le chapiteau. La scène est à 30 cm du sol, on ne peut pas faire plus en terme de proximité. Une configuration idéale pour apprécier pleinement le Blues du Suédois. Le public est ravi et l'ambiance est excellente. Des conditions live que les groupes semblent beaucoup aimer également.

 


Idem pour Namdose, groupe né de la fusion entre Ropoporose et BRNS. Les deux batteurs, Tim et Romain se font face, Pauline, Diego et Antoine sont aux guitares et clavier. Leur Rock indé est très rapide, rythmé par une guitare jouée sur les graves sur certains morceaux. Le rendu est obsédant et met rapidement le feu au public qui les entoure. On verra même une tentative de slam d'un spectateur optimiste et désinhibé sur Fast (tentative bien foirée, mais bon, en partant du sol c'est pas facile non plus !). Superbe concert.


 

Je retourne sur Grall pour Flavien Berger que je ne rate pas cette fois. Je me laisse tranquillement embarqué par sa pop/synthé planante. En plus, le visuel de la scène est sympa, l'artiste étant entouré de colonnes en mouvement recouvertes d'un drap, comme cerné par des robots fantômes. Le public accroche bien, Flavien Berger s'en étonne presque : "Vous avez tenu jusque là, c'est incroyable, on va pouvoir envoyer le son alors !". Il enchaîne avec La Fête Noire que n'aurait pas renié le regretté Alan Vega. Très bon set.

 

Je termine cette première journée de Charrues avec Nile Rodgers & Chic sur Kerouac. Quelques titres du groupe pour débuter puis des reprises de toutes les collaborations du guitariste : Diana Ross (I'm Coming Out, Upside Down), Madonna (Material Girl, Like A Virgin), David Bowie (Modern Love, Let's Dance) Sheila (Spacer), Daft Punk (Get Lucky) pour finir avec Le Freak et Good Times. Un passage en revue qui souligne bien toute l'influence de Nile Rodgers sur la musique Soul, Pop, Funk et Disco depuis 40 ans. La prairie de Kerampuilh s'est transformée en boite de nuit géante pour un moment dansant très fédérateur.

 

VENDREDI : Gainsbourg pleure sur les Charrues


Le temps se couvre et la pluie est annoncée. Clara Luciani ouvre la journée sur Kerouac, "Il n'y a que les Bretons pour mettre une telle ambiance à l'heure du thé !" s'exclame-t-elle. Je me demande bien où elle a vu du thé, vu qu'ici c'est la bière de 8h du mat' à 8h du mat' ! Son set ne me touche toujours pas, je file voir Atoem en show case au stand Label Charrues/Bretagne au Cœur. Leur musique  intrigante s'apparente à du synthé modulaire. Ils sont, avec le rappeur quimpérois Di#se, les gagnants du Label Charrues 2019.


La pluie tombe sur Kerampuilh, les tonnelles protègent l'orchestre symphonique qui accompagne Jane Birkin. Pendant 1h15, nous voilà bercés par toutes ces mélodies que nous connaissons par cœur, interprétées par la plus légitime des chanteuses de Gainsbourg et merveilleusement orchestrées par Nobuyuki Nakajima : Requiem Pour Un Con, La Chanson De Prévert, Pull Marine, La Gadoue (de circonstance), L'anamour, pour finir en beauté avec La Javanaise. Une belle averse de poésie.

 
Peu avant 18h, je m'offre une bière locale et un burger étoilé préparé au jardin des chefs, c'était délicieux et cela m'a permis d'assister au rush impressionnant de plusieurs centaines d'ado arrivant du camping et s'entassant aux fouilles avant de sprinter pour se placer au concert de Aya Nakamura. Santé et puis bonne chance surtout...
Je vais sans hésitation sur Gwernig pour le concert de Saodaj' qui fût un très bon moment. Le groupe venu de La Réunion est un beau métissage des cultures où se mélangent chants polyphoniques percussions traditionnelles et nombreux instruments atypiques. Une belle découverte.

 

Le Rock arrive enfin à 20h avec Razorlight sur la scène Grall. Johnny Borrel à la guitare et au chant est en pleine forme et la mayonnaise prend aussitôt. Alternant titres Pop comme In The Morning avec morceau Rock "à la Led Zep" comme In The City, Razorlight  nous offre une prestation très honnête et sans chichi. Ça fait du bien par où ça passe.

 

Deux semaines après leur passage à Beauregard, j'assiste à mon deuxième concert de Tears For Fears. Le set étant rallongé de 20 minutes, les Charrues auront le droit à 4 titres supplémentaires dont Advice For The Young At Heart, Woman In Chains, Suffer The Children et Badman's Song que j'ai beaucoup aimé. Très bonne prestation de Tears For Fears encore une fois et mention spéciale à Roland Orzabal pour sa reprise de Creep de Radiohead et pour toute la sympathie qu'il dégage sur scène.

 

C'est la 4ème fois qu' Iggy Pop vient aux Vieilles Charrues. Les aboiements qui retentissent depuis la scène Glenmor ne laissent planer aucun doute sur l'entrée en scène de l'iguane. I Wanna Be Your Dog, Gimme Danger, The Passenger, Lust For Life, Skull Ring, ça démarre très très fort. Iggy Pop est intenable, squattant l'avancée, torse nu sous la pluie...à 72 ans ! Quelle ambiance et quelle énergie ! La réalisation caméra que les écrans renvoient est vraiment top et dynamise encore plus le set. Toujours proche de son public, Iggy descend dans le crash barrière pendant un Search And Destroy mémorable avant de chanter The Jean Genie de Bowie. Il est vraiment incroyable, il n'y a que lui pour pouvoir porter un blouson mi-cuir mi-panthère et garder une telle allure. LE concert du weekend !

 

 

SAMEDI : Georgio vs Black Eyed Peas

J'assiste à la conférence de presse de Georgio. Détendu et souriant, le jeune rappeur y raconte avec franchise  comment les voyages, son entourage et la psychanalyse l'ont aidés à sortir de la dépression. Il explique son processus de création et son désir de rester libre artistiquement. Côté album, le rendez-vous est donné aux fans en 2020 pour un nouvel opus (17 à 18 chansons dans les tuyaux, pas forcément toutes exploitables aujourd'hui).

 

Je me place ensuite devant Alice Merton sur Kerouac. Je reste de marbre devant sa pop variétoche et je fuis au bout de 4 chansons (quand même).

 

Je me réfugie sur Gwernig devant Lalala Napoli où je passe un excellent moment. La musique est traditionnelle et chaleureuse. Nous ne sommes malheureusement que quelques dizaines à profiter de cette Italie aux reflets tziganes qui méritait plus de monde. Mais ce n'est pas grave. Dansons !

 

Je ne sais pas si j'ai bien fait mais j'ai choisi ensuite Vendredi Sur Mer qui jouait en même temps que Muthoni Drummer Queen. Le groupe porté par la jeune Charline Mignot n'est pas dénué de charme. Deux danseurs contemporains complètent l'ambiance nacrée du concert. Côté textes, on plonge dans le carnet intime d'une jeune femme aux pensées érotiques et ambiguës. Un côté Sphynx de La Femme et Maman A Tort de Mylène Farmer. Je me suis laissé embarquer sans rechigner.

 

J'ai ensuite partagé mon temps entre Georgio et Mnnqns. La chaude ambiance promise par le jeune rappeur parisien s'est transformée en véritable chaudron. Une prestation vraiment appréciée par un grand public de fans et une véritable osmose qui se terminera au milieu de la foule pour un final explosif.
Mnnqns a le difficile rôle de remplacer au pied levé Fontaines D.C. et endosse le costume de seul groupe de Rock du jour ! Il en faut plus pour déstabiliser les Rouennais auteurs d'un très bon set.

 


 

Retour sur Glenmor pour la tête d'affiche du jour : The Black Eyed Peas. Ça faisait longtemps que les organisateurs voulaient les programmer, ça arrive enfin mais le groupe de Los Angeles s'est séparé de sa star chanteuse Fergie qui reste très emblématique. Devant la scène, c'est la foule des grands événements à Carhaix, le set débute après 15 minutes de retard, un quart d'heure animé par un DJ chauffeur de public. Le groupe arrive finalement sur scène sur Let's Get It Started. Vêtus de tenues fluorescentes et gesticulants dans tous les sens sur une musique en grande partie enregistrée, j'ai l'impression de voir les 2 Be 3 version américaine. Ce n'est pas l'arrivée sur scène de Jessica Reynoso qui changera grand chose. La suppléante de Fergie chante bien et twerk bien, c'est super ! Tout comme Limp Bizkit il y a 15 jours, le concert de Black Eyed Peas m'est apparu très superficiel.

 

DIMANCHE : Bon anniversaire HFT

Couché tôt, j'arrive tôt ! Les jambes sont un peu lourdes à l'aube de ce quatrième jour de Charrues. Il faut dire que le site est vraiment grand et on marche beaucoup pendant le festival, ce qui n'est pas une mauvaise chose. Je tiens à me placer correctement pour BCUC (prononcer Bissiyoussi) dont j'ai entendu le plus grand bien  sans jamais pouvoir le vérifier de mes propres yeux...jusqu'à aujourd'hui. Pour faire court, j'ai pris une grosse claque devant les rythmes transcendants et tribaux du groupe africain. Après avoir fait résonner une corne ancestrale, Jovi Zithulele au chant s'échauffe tel un boxeur sur un ring. En véritable leader, ce dernier vient interpeller le public au plus près avant de lancer un déluge de percussions d'un coup de sifflet ou d'un cri. Il ira même jusqu'à nous faire une série de pompes claquées après une heure de concert. Peu de monde à cette heure pour profiter de ce groupe épatant. Le public présent lui est aux anges, il ovationne le groupe réuni pour un dernier salut et un Kenavo de rigueur. Génial !

 

 

Hubert Félix Thiéfaine est en tournée anniversaire. Quarante ans de discographie que le chanteur résume en un set d'une heure et quart, entouré de dix musiciens (dont son fils Lucas à la guitare).
Plus jeune, Thiéfaine je ne captais pas, je n'étais pas assez poète ou pas assez fumé. J'étais passé à côté, plus sensible aux textes de Couture ou Higelin à l'époque. Aujourd'hui j'aime beaucoup, y compris les dernières chansons, je ne sais pas ce qu'il faut en déduire ! 😄
Mais voilà, 22 Mai, Les Dingues Et Les Paumés, La Ruelle Des Morts, La Vierge Au Dodge.51, Lorelei Sebasto Cha, Confessions D'un Never Been, Mathématiques Souterraines, Alligators 427, Sweet Amanite Phalloïde Queen et pour finir La Fille Du Coupeur De Joints, autant de titres que j'ai beaucoup de plaisir à écouter, surtout en formation Rock comme aujourd'hui.
Je repars réjouis fredonnant tout seul "♫ Oh mais laisse allumé bébé, y'a personne au contrôle...♫"

 

Pendant la conférence de presse finale, les organisateurs parlent d'une édition colossale à 270 000 festivaliers. Jérôme Trehorel, le directeur des Vieilles Charrues, met en avant le confort et l'accueil du public, les efforts réalisés en matière de décoration pour faire de la prairie de Kerampuilh un vrai lieu de fête, une bulle de rêve et d'évasion de quatre jours. Jean-Luc Martin, le président de l'association, insiste quant à lui sur le caractère associatif du festival qui ne reçoit aucune subvention de qui que ce soit et qui, au contraire, reverse chaque année environ 135 000 euros à plus de 130 associations. Un audit sur l'impact économique du festival sur la région est d'ailleurs programmé pour l'automne.


J'arrive pour le dernier quart d'heure du concert de Tamino. Le jeune chanteur est accompagné à la basse par Colin Greenwood de Radiohead. Avec Creep, interprété vendredi par Tears For Fears, je me prend à rêver de voir Tom Yorke et son groupe à Carhaix...

 

"Je dois beaucoup à Le Bretagne. Mon parcours commence il y a deux ans aux Transmusicales de Rennes. Avant, personne ne savait que j'existais. Depuis, je suis sur les routes et je ne sais même pas quel jour on est ! ". Ainsi se présente Nakhane sur la scène Graal. Doté, tout comme Tamino juste avant d'une voix magnifique, j'ai été plus touché par la grâce du Sud Africain. Beaucoup d'émotions dans ses chansons et une présence sur scène très magnétique. Seul bémol, on entendait beaucoup le son de Glenmor où se produisait Lomepal dans le même temps. A revoir pour confirmer cette très belle impression.

 

C'est la fin du set de Lomepal que je vois sur écran : je comprend pourquoi nous n'étions pas très nombreux devant Nakhane ! Impressionnante foule qui s'étend jusqu'à la scène Kerouac et qui reprend par cœur les paroles du rappeur parisien.


Les Australiens de Parcels ont de la French Touch dans les veines. Forts de leur collaboration avec les Daft Punk, leur musique pourrait tout à fait être issue de l'Interstellar 5555 des robots parisiens. Louie, Patrick, Jules (troublant sosie de George Harrison), Noah et Anatole ont la banane : ça se voit et ça s'entend. Illuminés par les derniers rayons de soleil du jour, les cinq garçons sont tout sourire et prennent un plaisir non dissimulé à jouer ici, maintenant. Le public lui aussi s'éclate sur Lightenup, Withorwithoutyou, Everyroad, ou sur Tieduprightnow. C'est très bien joué, c'est très dansant et ça colle parfaitement avec le moment.  Brillant !

 

 

Ainsi se termine pour moi cette nouvelle édition des Vieilles Charrues qui aura eu, une nouvelle fois, son lot de très bons concerts et de belles découvertes. Le samedi m'est apparu un peu long je dois l'avouer mais les trois autres journées ont suffit à mon bonheur. C'est la première année où je passe si peu de temps sur Glenmor, mais l'avantage ici, c'est qu'il y a trois autres scènes pour y trouver son compte. Le festival s'est beaucoup rajeuni, l'ambiance est restée vraiment très bonne, que ce soit avec les bénévoles (plus de 7 000), les groupes et les artistes visiblement ravis d'être là et avec les festivaliers qui ont fait la fête comme jamais. Si cette édition ne fût pas mémorable au niveau de la programmation, elle l'a été au niveau de l'ambiance. C'est ça les Vieilles Charrues.

Mon top 5 :
1 Iggy Pop
2 BCUC
3 Namdose
4 Hubert Félix Thiéfaine
5 Razorlight

Toutes les photos ICI                                                                                                                      Jérôme


mardi 9 juillet 2019

Festival Beauregard #11

Comme chaque année, nous nous retrouvons en Normandie pour le festival Beauregard qui se déroule à Hérouville-Saint-Clair près de Caen. C'est la 11ème édition et cette année la prairie qui accueille près de 30 000 festivaliers par jour s'est agrandie, histoire de libérer un peu plus d'espace et de rendre les mouvements de festivaliers plus fluides entre chaque scène. La grande roue, installée pour les 10 ans du festival, est de retour coté château cette fois. Le rendu est splendide. La programmation quant à elle, est plus ouverte cette année et a de quoi intéresser un public plus large que seuls les amoureux du Pop/Rock anglo-saxon. Beauregard se porte bien, le public a répondu présent à l'affiche proposée et à la météo parfaite puisque pour la deuxième année consécutive le festival normand dépasse les 100 000 spectateurs (108 000 pour être précis). Retours sur ces 4 jours.


JOUR 1: John Bulter Trio au dessus du lot.

C'est MNNQNS (prononcer mannequins), composé de quatre musiciens rouennais qui se charge d'ouvrir cette 11ème édition. Le groupe est franchement bon et convainc sans problème les premiers festivaliers réunis devant la scène John avec une Brit/Pop acérée, quelque part entre The Fall et The Wombats. Les riffs appuyés du guitariste viennent à bout de deux cordes et, alors que le groupe allait entamer leur dernier titre, il est stoppé par la régie pour raison de timing. Nous laissant comme une envie de les revoir dès que possible pour finir ce qu'on avait commencé.


C'est le moment de faire un tour pour découvrir les animations de cette année. Le thème de Beauregard mêlant l'esthétisme et le burlesque est désormais posé de manière durable et l'on peut profiter à tout moment de plusieurs happening sur le site.

 
 

Nous jalousons une petite fille qui porte un casque anti-bruit devant Therapie Taxi #idéedegénie et un peu plus tard pour Angèle, nous écoutons des milliers de spectateurs qui reprennent en chœur les paroles de la chanteuse belge devenue superstar en quelques mois. C'est du Bruel à la grande époque (ah ah ah), c'est mimi tout plein et ça nous laisse perplexe, on ne va pas le cacher. Devant tant d'engouement, on va faire un tour de grande roue.

 
 

C'est John Butler Trio qui va nous apporter ce que l'on attendait. Un concert teinté de bonne humeur, de simplicité et de partage. Déjà venu ici il y a cinq ans, le groupe australien confirme sa très bonne réputation scénique. Trois titres du dernier album, mêlés aux excellents Zebra, Better Than That et bien entendu Ocean et ses 10 minutes de folie sur 11 cordes dont on ne se lasse pas (John Butler n'utilise pas de double corde sur le G 😉).

 

Le show attendu de Limp Bizkit sur la grande scène Beauregard est vite retombé après une entrée sur scène puissante. C'était bizarre, voire génant. La tenue de Fred Durst, un peu trop déguisé en Beastie Boys, la rangée de jeunes filles (groupies ?) visibles en backstage, les tentatives du groupe pour faire décoller le set sans jamais y arriver (sample de Seven Nation Army, reprise de Smells Like Teen Spirit, jusqu'à entonner La Marseillaise). Wes Borland à la guitare, en cuissardes et grimé en Zombie/CowBoy semble au moins afficher clairement la couleur.

 

Troisième venue à Beauregard pour Gossip. Beth Ditto et sa bande étaient la tête d'affiche de la première édition et avaient fait un carton à l'époque. Le second passage en 2012 s'était avéré décevant alors autant dire qu'on ne savait pas trop à quoi s'attendre. Voix toujours aussi puissante, visiblement en forme, Beth Ditto n'a pourtant pas donné le meilleur d'elle même. Bavarde, et plutôt relax, la diva américaine s'amuse de sa perruque et des textes qu'elle oublie jusqu'à shunter une chanson prévue. Néanmoins, on ne boudera pas notre plaisir de réentendre sur scène Love Long Distance, Standing In The Way Of Control, Careless Whisper ou Heavy Cross. Un retour sur scène globalement moyen.


 

Cette soirée se termine avec Fat Boy Slim. Bien loin de la Pop des Housemartins avec qui il a débuté il y a 35 ans, Norman Cook envoie du lourd à grands coups de samples et de mix puissants. Tout y passe : Queen, House Of Pain, Daft Punk, Ramones et Rolling Stones sur The Rockafeller Skank. C'est passé tout seul !

 


JOUR 2 : Sous le charme de Balthazar.

Et ça démarre fort avec We Hate You Please Die, jeune groupe rouennais (y'a du talent à Rouen !), vainqueur du tremplin John's Session organisé chaque année pour promouvoir la scène locale. On a beaucoup aimé ce groupe pour l'attitude et la musique (Garage Rock à la Thee Oh Sees). Raphaël au chant n'hésite pas à venir slammer et pogoter dans la foule, quitte à se faire bien "promener". Le groupe se qualifie de ni joyeux, ni triste, simplement des gamins énervés. On l'a constaté sur Rita Baston, Structure, Figure It Out, ou encore sur la chanson éponyme qui clôture le set dans un final en furie. Gros coup de cœur.


Autre coup de cœur, celui de Paul Langeois, le co-directeur du festival qui tenait à avoir cette année Fantastic Negrito. Peu connu en France, le chanteur américain va être un des moments forts du festival. Un style qu'on peut qualifier de Groovy Gospel, un look mi punk mi funk, Fantastic Negrito va totalement captiver son auditoire, occupant l'avancée de la scène en permanence, parlant tel un prêcheur. On retrouve chez lui du James Brown, du Robert Johnson, du Prince. Mention spéciale à Hump Thru The Winter, The Duffer et In The Pines (chanson traditionnelle américaine reprise par Nirvana sous le titre Where Did You Sleep Last Night?). Très belle découverte.


 

Nous étions bien curieux de découvrir Tamino sur scène mais malgré l'élégance du chanteur et sa très belle voix, l'émotion n'est pas venue.

 

Profitant d'un peu d'avance sur l'horaire, nous nous plaçons idéalement pour suivre Balthazar. Les Belges sont des habitués du festival puisque si l'on compte Warhaus (groupe de Marteen Devoldere) et J. Bernardt (projet solo de Jinte Deprez), c'est la quatrième fois en onze édition que le festival accueille le groupe ou ses ramifications. Mais quand on aime, on ne compte pas. Derrière une nonchalance de façade, Balthazar fait preuve d'une maîtrise impressionnante. L'alternance entre les deux chanteurs guitaristes est très bénéfique au rythme du set et musicalement, c'est vraiment impeccable, en témoignent les excellents Changes, Never Gonna Let You Down Again et Fever.


 

Notre pause restauration aura eu raison de Talisco (venu au dernier moment remplacer Snow Patrol). Nous restons devant le château, où on commence à être très très nombreux pour Bernard Lavilliers. Il est bien difficile de croire que ce monsieur a 72 ans ! Entouré par d'excellents musiciens, Bernard Lavilliers va en une heure, donner un bel aperçu de ses 50 ans de carrière. De Stand The Ghetto à Traffic, de Idées Noires à La Salsa. Sans oublier les dernières chansons, comme Bon Pour La Casse ou Croisière Méditerranée, dénonçant l'injustice ou la cruauté du monde actuel comme peu d'autres ont su le faire. Et puis Lavilliers, seul à la guitare, devant 30 000 personnes qui chantent avec lui On The Road Again...C'était beau tout simplement.

 

Le Suprême NTM qui fait sa tournée d'adieu est la sensation de la soirée. Nous ne ferons pas offense aux adeptes et aux fans, nous ne sommes pas assez connaisseurs du groupe pour juger. Nous restons donc à distance, assez indifférents à tout ça malgré la grosse machine déployée et l'énergie des deux compères sur scène.
Nous terminons cette journée avec The Blaze, groupe que nous avions vu l'année dernière aux Vieilles Charrues et que nous retrouvons à un horaire qui met bien plus en valeur le visuel. Le concept de la boîte/écran fait un carton et se marie très bien au lounge des deux musiciens. Ce sera suffisant pour aujourd'hui, nous laissons les festivaliers avec Etienne De Crécy qui présente son nouveau live (dont nous aurons de très bons échos le lendemain). 

 

JOUR 3 : Tabassés par Idles

Nous arrivons trop tard pour entendre les jeunes pousses de Beach Youth, nous passons direct à la transition du jour : Clara Luciani/Idles ! C'est un peu comme enchaîner monte escalier et saut à l'élastique. Gros ennui d'un côté, heureusement vite oublié avec les anglais déchaînés de Idles. On le sentait venir mais pas à ce point là ! Joe Talbot au chant, est impressionnant de nervosité, tournant en rond, se frappant le visage avec le poing, quand les autres zicos n'attendent que 30 secondes pour sauter dans la foule. Lee Kiernan allant même jusqu'à confier sa guitare à un fan dans la foule pour mieux pogoter dans la poussière. Entre les circles pit, Joe Talbot prend le temps de passer quelques messages car derrière la violence musicale le discours est clair et leur titre Danny Nedelko en est le meilleur exemple : Antifascisme, immigration, féminisme, défenseurs LGBT. Après entre autres Mother, Love Song (avec snipet de Nothing Compares 2U et A Place Where We Belong ), Samaritans et un final enragé avec Rottweiler, on fini complètement sur les rotules. Mais quel pied !

 

 

 

Il nous faudra plusieurs minutes pour nous en remettre, de quoi zapper Flavien Berger. Nous décidons de rester pour Columbine...On l'a fait et jusqu'au bout ! Voilà voilà... 😄
Roméo Elvis fera les frais de notre repas quotidien et des échanges toujours intéressants et très plaisants avec les amis rencontrés sur place (spéciale dédicace à Laurent et Erwin). 

 

Arrive ensuite l'heure de Ben Harper & The Innocent Criminals. La crainte d'un concert statique s'est confirmée sans attendre et malgré les très bons titres Whipping Boy, Burn One down, Diamonds On The Inside, le set est resté assez hermétique et la mayonnaise n'a pas vraiment pris. 
Idem pour Mac DeMarco qui en passant à 22h35 n'a pas bénéficié d'un horaire très adapté à sa cool attitude. Un passage en après-midi aurait été préférable. Nous avons néanmoins apprécié le voir déambuler en short/casquette et tenter sans succès de gonfler une poupée de martien (?). 

 

 

Pour continuer dans le grand écart de style, place à The Hives ! Le groupe suédois avait retourné la scène Beauregard il y a 6 ans et le public normand aura droit à la même punition ce soir. Pelle Almqvist est toujours aussi bavard ("mes amis normandiens !") et prend le temps de se recoiffer entre chaque titre. Le show n'a quasiment pas changé depuis 2013 (entrée en scène imparable avec C'mon), seuls 3 nouveaux titres ont fait leur apparition dans la set list dont I'm Alive qui est vraiment canon. The Hives prouve encore ce soir qu'il reste l'un des meilleurs groupes de scène. 

 

 

Mogwai était (comme nous) de la première édition de Beauregard ! C'est le souvenir d'un déluge de décibels qui nous arrivait en pleine figure qui remonte à la surface lorsque nous arrivons devant le génial Stuart Braithwaite et son groupe. Là encore, c'est une belle claque. Ambiance enfumée sur scène, light show à la hauteur et une musique qui a le don de transporter et de prendre les tripes avec des montées en puissances de dingues. Un vrai feu d'artifice encore une fois !

 

JOUR 4 : Rendez Vous avec Tears For Fears

Dernière journée qui commence pour nous avec Rendez Vous. Groupe de post-punk parisiens qui réveille brutalement tous les fatigués de Beauregard. Entrée en scène sur une intro criée, tel un hymne ou un aka et puissance à tous les étages. La basse est omniprésente et peut rappeler les Stranglers par moment. Aucun temps mort dans ce set envoyé comme un boulet de canon jusqu'au morceau final qui s'étend sur plus de 10 minutes de furie. Je ne saigne pas du nez là ...?

 

Autre coup de cœur des organisateurs, Bror Gunnar Jansson prend place en plein soleil devant une foule curieuse. Look de rocker 50's, le Suédois alterne blues ombrageux et rythmes jazz/rock. Un talent indéniable à revoir dans des conditions plus intimes pour apprécier pleinement.

 

Nous avions vu Jeanne Added il y a 3 ans ici même. A l'époque bien qu'ayant fait un concert tout à fait correct, nous n'avions pas été spécialement "portés" par sa prestation. Il se passera exactement le même phénomène aujourd'hui. Malgré de bons titres comme Radiate, Mutate ou A War Is Coming et toute l'énergie sur scène de la chanteuse. Désolé.

 

PLK, le sandwich était bon mais la musique de fond franchement dégueu. Et cette manie de faire résonner une corne de brume à la fin de chaque morceau me donne envie de baisser le son de son ampli à grands coups de batte de baseball. Dur !

Cat Power nous a calmé, charmé, ensorcelé. Quand Jeanne Added nous laisse de marbre pendant une heure, Chan Marshall nous attrape dès le premier couplet de He Turns Down. Quelle présence et quelle voix. Into My Arms, Horizon, Robbin Hood, Me Voy, Wanderer, pour ne citer que ceux-là agissent comme des charmes sur nous. Nous quittons avec regret la belle américaine, un peu chamboulés, pour nous placer au cœur de la foule qui s'accumule devant l'autre scène.

 

Tears For Fears est de retour ! Pour ne rien vous cacher, bien que fan des deux premiers albums du groupe, nous étions inquiets. Allions-nous assister un un concert de has been, de vieux beaux ? Il n'en n'a rien été. Alors bien sûr le duo a pris de l'âge, la voix de Curt Smith est moins forte (mais celle de Roland Orzabal...wouahou !) et les motivations de ce retour sont certainement discutable certes !  Mais malgré tout ça, Tears For Fears a fait forte impression. La set list comprend tous les tubes du groupe (manque Woman In Chains et Advice For The Young At Heart) auxquels s'ajoute Creep de Radiohead, superbement repris. Roland Orzabal s'exprime en très bon français et ira même jusqu'à descendre dans le crash au contact des fans. Très bonne prestation de Tears For Fears qui chasse au loin les doutes émis avant le concert.

 

 

Le festival s'achève pour nous sur la très bonne prestation d'Interpol. Là encore, nous avions un souvenir plutôt moyen de leur passage à La Route Du Rock il y a deux ans. Cette fois le groupe emmené par Paul Banks nous a conquis du début à la fin. On retient The Heinrich Maneuver, Evil, un superbe enchaînement Rest My Chemistry, The Rover, Slow Hands et un final tout aussi impeccable avec Roland. Le sentiment de satisfaction qui plane sur la foule est visiblement partagé par le groupe puisque Paul Banks, pourtant imperturbable, se met à esquisser des sourires et remercie chaleureusement le public. Classe !

 

Et voilà, ainsi se termine cette 11ème édition de Beauregard qui aura eu son lot de très bons concerts comme à chaque fois. Cependant, on note cette année une présence plus prononcée d'artistes rap, jeune public et bankables. Une tendance qui se généralise dans plusieurs festivals et qui offre une certaine garantie d'affluence. 
Comme chaque année nous avons été très bien reçus. La bonne humeur de l'ensemble des bénévoles présents sur ces 4 jours, associée au confort remarquable offert par le site et à la qualité globale de la programmation font du festival Beauregard un rendez-vous devenu incontournable.
A l'année prochaine !

Top 5 Milouze En Live :

1 - Idles
2 - Tears For Fears
3 - The Hives
4 - Balthazar
5 - John Butler Trio

Méchants coups de cœur : Cat Power, Fantastic Negrito, Rendez Vous, We Hate You Please Die, Mogwai, Interpol.

Toutes les photos ICI