samedi 2 octobre 2021

VOX LOW + HEIMAT@ La Carène - 1er octobre 2021, Brest

Il y a 3 ans, l'indispensable label Born Bad Records publiait un album à la pochette austère (grand ensemble industriel sur fond rouge) qui fit l'effet d'une grosse claque : Vox Low. Un 1er album et un coup de maître que beaucoup considèrent à juste titre comme une référence ColdWave/Electro. A l'occasion d'une soirée "découverte" où se produisait également le duo underground Heimat, Vox Low débarquait pour la première fois à Brest et sans surprise, c'était à guichet fermé.

Véritable ovni musical, Heimat compte 2 albums au compteur. Le dernier, intitulé Zwei et sorti en mai, a reçu un bel écho de la part des critiques. Plongé dans une quasi obscurité sur scène, le duo propose une étrange association de rythmes synthétiques composés par Olivier Demeaux (du groupe Cheveu), sur lesquels Armelle Oberle vient pianoter des accords parfois tordus et imposer sa voix forte. Les textes sont en allemand, en italien (peut-être aussi dans un autre langage que je n'ai pas capté) mais le style vocal oscille entre incantations chamaniques et chant asiatique. Ce rendu étrange a de quoi surprendre forcément, déstabiliser peut-être, mais finalement captive le public resté réceptif tout le set. 

A l'instar de Frustration ou Cannibale, d'autres groupes du label parisien Born Bad Records, les 4 zicos de Vox Low ne sont pas des perdreaux de l'année. Tous sont excellents dans leur domaine et ont une grosse expérience du métier, que ce soit en production ou en création. La musique du groupe transpire la maîtrise et le haut niveau avec de belles influences. Celles et ceux qui aiment Joy Division, Kraftwerk, Neu!, Gary Numan ou encore Killing Joke seront forcément accrochés par Vox Low. J'y ai retrouvé aussi un peu de Mary Goes Round, groupe français sous-estimé qui œuvrait à la fin des années 80. 


La musique de Vox Low n'est pas rassurante du tout. Elle pourrait être la B.O. parfaite d'un film d'anticipation ou post apocalyptique. D'ailleurs, quand je vois la tempête qui s'abat sur Brest au lendemain de ce concert, je me demande si tout ceci n'est qu'une malheureuse coïncidence... Le plan satanique de Vox Low est bien rodé : une montée en puissance progressive, rythmique d'enfer, imposée par un jeu de basse très présent et un batteur généreux d'une précision impressionnante. Ajoutez à cela des nappes électroniques, une guitare bien dosée, un chant grave, monocorde, presque synthétique, et vous obtenez ce style hypnotisant et irrésistible comme sur It's Rejuvenation ou encore Now We're Ready To Spend

 

Les titres sont puissants et s'étendent souvent au delà des 10 minutes, You Are A Slave, The Hunt, Some Words Of Faith puis le mix final Something Is Wrong. Le tempo basse/batterie maintenu par Benoît Raymond et Mathieu Autin se mêle aux ondes parfois hautes fréquences que Guillaume Léglise et Jean-Christophe Couderc balancent depuis leurs synthés analogiques. Ce dernier répète inlassablement, telle une I.A. en plein bug, I Am A Strange Machine Sometimes. Superbe final, Vox Low maîtrise parfaitement l'art de la vibration, cette petite touche de Moroder qui dégage, dans cette moiteur inquiétante, ce coté groove très addictif. A voir absolument.


                                                                                                                                                         Jérôme

vendredi 1 octobre 2021

LES TÊTES RAIDES @ La Carène - 30 septembre 2021, Brest

Sept ans après leur dernier passage, les Têtes Raides sont de retour ce soir à La Carène pour un double événement : pour les 30 ans de Ginette, chanson incontournable et véritable hymne du groupe sur scène, mais aussi pour la sortie toute fraîche de leur 17ème album Bing Bang Boum. Une tournée qui rassemble le groupe dans la formation d'origine, ce qui ne s'était pas produit depuis un bon bout de temps ! Autant de bonnes raisons pour débuter idéalement une nouvelle saison de concerts et de festivals.

Alors...On y va !!!???

Un gyrophare géant inonde la salle d'une lueur rouge et inquiétante lorsque le groupe entre en scène. Le ton est donné dès la première chanson : «...cyclones, fureurs, incendies, tremblements...En avant ! ». Pas de tiédeur ou de demi-mesure avec les Têtes Raides, que ce soit léger ou grave, glaçant de vérité ou bouleversant de poésie, on est toujours captivé par le charisme dégagé par ce collectif. Le public est réactif d'emblée. Nul besoin de s'observer, de s'apprivoiser, on se connait, on partage tant de choses déjà. Retrouver les Têtes Raides sur scène c'est un peu retrouver des amis de longues dates. Christian, Grégoire, Edith, Serge, Anne-Gaëlle, Kropol, Cali et Jean-Luc : le canal historique comme ils se sont amusés à l'annoncer eux-mêmes.

Christian Olivier se livre un peu plus que d'habitude et évoque la privation de concerts et de la joie de retrouver le public et la scène : «...Il y a des chansons que l'on joue pour la deuxième fois seulement ce soir, on est heureux d'être ici...c'est très émouvant de vous retrouver...il faut profiter de ces moments là, des moindres failles où la culture peut s'immiscer, c'est très important...». Les émotions qui alternent au gré des chansons et des textes sont renforcées par un excellent éclairage, qui passe du blanc stroboscopique (Georgia), au spots multicolores (Abécédaire) et à la lumière chaude et tamisée (Emily). Une mise en scène, qui secoue le public lorsque Christian Olivier récite le superbe texte de Jean-Pierre Siméon Levez-Vous Du Tombeau, l'amuse lorsqu'il s'affuble d'une tête de mort géante en papier mâchée sur Latuvu, et enfin le chavire lorsqu'il envoie valser la fameuse lampe de Ginette

 

Le plaisir est partout. Dans la section de cuivres sur Are You Ready ?, dans le jeu délicat de piano/batterie sur Des Silences, dans la présentation clownesque du groupe sur Latuvu, dans l'intensité de Fragile, de L'Iditenté, dans la joie de Journal et de Bas Quartier, dans la guitare et le violoncelle de Fulgurance, dans le chant du public sur Gino et Saint Vincent. Parmi les vingt-sept titres joués ce soir et piochés dans la riche discographie du groupe, une dizaine est extraite du dernier album Bing Bang Boum. Mention spéciale au sublime Le Frisson qui continue de me troubler à l'heure où j'écris cette chronique. 

Le groupe après plus de deux heures de concert est largement ovationné par le public de Brest. Avant de partir Christian Olivier tient à remercier tous les techniciens et toute l'équipe de La Carène avant de s'adresser une dernière fois au public : « Merci infiniment, vraiment ! Et, une dernière chose...on va revenir ! ». Not Dead sont Les Têtes Raides, pour notre plus grand bonheur ! 

...On va s'aimer encore

Là, pendant des années

J'étais là moi monsieur !

                                                                                                                                                                                                  Jérôme