mercredi 27 novembre 2019

Festival Invisible #14 @ La Carène, 23 novembre 2019 - Brest

Après le Bivouac de la veille où se produisait notamment Young Gods, place au Hamac pour cette seconde soirée de Festival Invisible à La Carène. L'intitulé de la soirée était trompeur, et ceux qui s'attendaient à du farniente, à l'ombre d'une enceinte réglée sur volume 2, ont vite vissé leurs bouchons d'oreilles. Les groupes au programme : Charnel Ground (USA), Motorama (RUS), It It Anita (BEL) et Rats On Rafts (HOL). Quatre styles, quatre énergies, quatre beaux spécimens réunis dans une même jungle, avec la même envie féroce de nous bouffer tout cru. 

Pour l'occasion, La Carène est configurée en mode festival. Les groupes se produisent à tour de rôle sur une scène installée dans le Hall près du bar et sur la scène du Club. Les changements de plateaux sont rapides et placés sous la maîtrise d'un Didier Set, du disquaire brestois Bad Seeds, capable de passer au cours de la même soirée, Ascension Day de Talk Talk et Histoire Merveilleuse des Charlots. Respect !

C'est Charnel Ground qui lance les hostilités. Power Trio constitué de véritables pointures du genre. Le set est exclusivement instrumental et oscille entre performance Psyché et gros son. Chris Brokaw (Come, Codéine, Dirtmusic, Pullman) à la guitare, alterne entre notes cristallines et riffs noisy. Doug McCombs (Tortoise), à la basse, dégaine un son lourd et millimétré, quant à Kid Millions (Oneida) à la batterie, il régale avec son style jazzy et sa justesse d'exécution. Le groupe est précis, semble parfois basculer vers l'impro tout en étant d'une impressionnante maîtrise. Derrière une allure faussement ordinaire, Charnel Ground nous offre une entrée en matière remarquable.

 

Motorama prend le relais au Club. Eux aussi sont en mode trio, pour cette nouvelle tournée européenne dont c'est la première date ce soir. Vlad Parshin, Maksim Polivanov et Mikhail Nikulin sont toujours aussi taiseux. Cette austérité qui caractérise le groupe russe sur scène est un vrai cliché à lui tout seul. Mais comme pour un défilé de mode, si le mannequin fait la gueule, c'est pour mieux se concentrer sur le travail de l'artiste. Musicalement c'est nickel. Motorama, que l'on comparait à ses débuts à Joy Division ou encore aux Smiths, fait désormais du Motorama. Une Cold Wave, qui de part sa clarté, met en valeur un vrai sens de la mélodie. Mention spéciale à Tell me, Heavy wave, Wind In Her Hair, Alps et Second Part. Au cours du set, Vladislav Parshin alterne les instruments (guitare, basse, synthé) et malmène les cymbales à coup de câble électrique, de baguette ou au poing. Maksim Polivanov lui, est imperturbable et s'applique sur chaque note solo. Son jeu est devenu une véritable signature musicale. Devant le public totalement conquis, Vlad peut enfin esquisser un sourire avant de quitter la scène.

 

 

A voir les musiciens de It It Anita, complètement au taquet et ruisselants de sueurs à la fin de Tanker 2, Pt.1, ceux qui débarquaient à ce moment là auraient pu croire à la fin du concert. Non, c'était le premier morceau ! Totalement déchaînés, les zicos de It It Anita ont retourné La Carène en trente secondes. Leur musique est speed, hyper puissante et chaque riff de guitare envoyé par Damien Aresta est une vraie morsure de Pitbull. En face de lui, Michael Goffard semble faire du rodéo avec sa gratte, qu'il envoie aux quatre coins de la scène. En arrière plan, Elliot Stassen (basse) et Bryan Hayart (batterie) assurent une rythmique façon semi-remorque. Bref, je transpire rien que d'y repenser. It It Anita a beaucoup tourné avec Lysistrata cette année et partage, avec le jeune groupe français, ce côté destroy et sans concession. Le public est chauffé à blanc et pogotte autour de Damien descendu dans la foule sur Another Cancelled Mission. Il est rejoint par le reste du groupe pour un final dantesque dont on ressort complètement sonné.

 

 

J'imaginais les Hollandais de Rats On Rafts un peu fébriles à l'idée de passer après la furie belge, il n'en fut rien. David Fagan (guitare et chant) et sa bande en ont vu d'autre et ne se laissent pas démonter. Moins sages qu'ils en ont l'air, le style musical de Rats On Rafts est plutôt Post-Punk mais pas que. Sur le morceau d'ouverture, l'accélération progressive provoquée par Arnoud Verheul (guitare) est irrésistible. Là encore, on est rapidement attrapé et on n'est plus lâché. Il faudra un rapide coup d’œil à l'horaire pour nous extirper de notre Hamac dans lequel nous serions bien restés lovés, malgré les secousses.

 

Après 5 heures de musique, nous quittons La Carène, encore une fois conquis par cet indispensable Festival Invisible qui régale chaque année, de part sa diversité, sa qualité d'organisation et de programmation.

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dimanche 10 novembre 2019

ARCHIVE @ La Carène, 8 novembre 2019 - Brest

La France aime Archive. Le groupe anglais qui fête ses 25 ans cette année le sait bien et sur les 49 dates de cette tournée anniversaire, 18 sont programmées dans l'hexagone !  L'étape brestoise est la troisième de la liste et affiche complet (comme toutes les dates en France) depuis plusieurs jours. Le souvenir du magnifique concert, joué ici même il y a deux ans lors de la tournée The False Fondation, est encore frais et nous avions hâte de retrouver Darius Keeler, Danny Griffiths, Pollard Berrier, Dave Pen et surtout Maria Q, de retour au chant avec le groupe (une première pour nous en 4 concerts de Archive). Toutes ces bonnes vibrations étaient la promesse d'un bon concert, ce fût bien plus que ça ! 


Aucune première partie n'est programmée ce soir. Pendant deux heures et demi, Archive va puiser ses chansons dans ses 12 albums studios et offrir le meilleur et le plus représentatif de leur carrière. C'est Maria Q qui débute au chant avec You Make Me Feel. Avec Pollard Berrier et Dave Pen, ils se partageront le micro et la scène tout au long de la soirée, rappelant que la raison d'être et l'essence d'Archive est avant tout d'être un collectif musical. La première émotion forte arrive sur Pills que la chanteuse interprète à merveille sur un crescendo clavier/guitare/rythmique, véritable signature musicale du groupe. Suit le lancinant Bullets. Darius quitte ses clavier une première fois pour se positionner comme chef d'orchestre au centre de la scène martelant le tempo de ses bras pendant le déluge de guitare qui tombe en fin de morceau. Danny Griffiths, l'autre hémisphère d'Archive est plus statique. Positionnés face à face, chacun à une extrémité de la scène, les deux maîtres à composer du groupe semblent, comme à leur habitude, contrôler tout le concert avec une précision d'horloger. 


Ce soir les titres sont enchaînés sans temps mort et le light show, toujours très efficace, est plus sobre que lors de la précédente tournée. Vocalement c'est aussi très impressionnant ! Wiped Out, Baptism, Finding It So Hard sont magistralement interprétés par dessus un rythme qui s'accélère petit à petit. Du trip/hop vers l'électro/rock progressif, comme très peu savent le faire. Qui fait ça aussi bien d'ailleurs ? C'est l'occasion aussi d'apprécier le son impeccable renvoyé par La Carène de là où nous étions positionnés.
Deux nouveaux morceaux sont joués : Erase et Remains Of Nothing où les trois voix se croisent entre couplets Art rock et Rap (initialement avec le groupe britannique Band Of Skulls sur l'album anniversaire 25).  Là encore, une très grande maîtrise. 


Marie Q revient une dernière fois au chant pour interpréter Collapse/Collide avant de laisser Pollard Berrier enchaîner avec Controlling Crowds, sûrement le titre le plus connu du groupe en France. La puissance des claviers tranche avec les passages a capella du chanteur. L’enchaînement est parfait avec Dangervisit qui commence en doux phrasé répétitif pour finir en transe electro/rock noyée dans une déluge de lasers qui balaie la salle.


Le rappel est splendide : Lights tout d'abord et ses longues minutes hypnotisantes avec là encore un jeu de lumières en accord parfait avec l'ambiance musicale. L'ultime part de ce gâteau d'anniversaire est Again, également joué en version longue, débuté à la guitare sèche et se terminant en une puissante mélodie progressive qui rappelle Shine On You Crazy Diamond des Pink Floyd. Référence à qui Archive peut être comparé légitimement. 
Totalement comblée, La Carène ne se privera pas pour ovationner comme il se doit ce groupe si créatif et talentueux.


                                                                                                                                                    Jérôme
 
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samedi 2 novembre 2019

THE DIVINE COMEDY @ La Carène, 30 octobre 2019 - Brest

Qui veut faire des heures sup' au bureau ce soir ? Environ 1 200 personnes !
Il faut dire que la réunion est animée par Neil Hannon, charismatique leader de The Divine Comedy qui vient présenter son dernier opus (le 12ème!) intitulé Office Politics. Un concept album qui pose un regard amer sur la société du travail et "les joies" de l'open space. Les temps modernes version Neil Hannon, c'était mercredi soir à La Carène.


Le groupe entre en scène après une première partie sympathique Man & The Echo. 
Neil Hannon ose le costume orange sans se ridiculiser pour autant. Il y a des gens comme ça... Entouré de cinq collaborateurs, le Britannique est au centre d'un bureau vintage reconstitué et surplombé par une horloge géante dont les heures vont défiler au rythme du set. Impossible d'échapper à ce terrible cadran, le public est lui aussi à la place de l'employé confronté à ses horaires. Il est 08h00, réveil tonique avec Europop, Infernal Machines et Generation Sex. Malgré quelques mots en français, Neil Hannon préfère converser en anglais entre les morceaux. «Sinon, vous n'allez rien comprendre», explique-t-il tout sourire. L’enchaînement qui suit abrite son lot de petites merveilles, notamment Commuter Love, Norman And Norma, le Beatlesien Absolutely Obsolete et To The Rescue. Il est déjà 14h00


 

Nous sommes pile au milieu du set, c'est l'heure de la publicité promotionnelle. «Vous aimez les synthétiseurs ?» Question anodine que Neil Hannon pose au public qui ne se méfie de rien.  Il se lance alors dans un phrasé rapide et monocorde, noyé dans une marée de notes synthétiques fusant de toute part. The Synthetiseur Service Centre Super Summer Sale. Et lorsque, sur les dernières notes de cet interlude, un spectateur lance un suppliant «Stop it !», cela provoque l'hilarité sur scène comme dans la salle. La suite est bien plus agréable avec I'm a Stranger Here, interprété à la guitare acoustique et accompagné de chœurs façon chorale. Splendide.

Il se passe toujours quelque chose avec The Divine Comedy. Il est 21h00, et après une bonne quinte de toux émanant des musiciens, l'heure est à la détente et à la fête. Office Party ! Chapeaux pointus sur la tête, ballons de baudruche aux quatre coins de la scène, le bureau se transforme en dancefloor avec At The Indie Disco, Becoming More Like Alfie et le génial National Express dont le swing est repris par toute la salle : Ba ba bada ba ba bada...
Le final est plus doux, il est désormais 02h00 du matin : After The Lord Mayor's Show, A Lady Of A Certain Age, le magnifique Absent Friends avant de finir avec When The Working Day Is Done, naturellement.

 

Rappel exigé, le groupe se rassemble au devant de la scène pour un ultime tour de chant : Songs Of Love et Tonight We Fly, merveilleux titre qui résume, à lui seul, le ressenti de la soirée. Après une longue ovation, Neil Hannon, visiblement ravi, quitte le bureau...cravate sur la tête. Nice job !

                                                                                                                                                    Jérôme