lundi 14 novembre 2022

Herman Dune + Quinquis @ Sew, 13 novembre 2022 - Morlaix

Le lieu tout d'abord : Le Sew, ancienne manufacture des tabacs qui regroupe aujourd'hui trois structures culturelles morlaisiennes. Un écrin superbe qui convient parfaitement à la tournée de Herman Dune qui l'aura amené à jouer dans des salles conventionnelles mais aussi des endroits atypiques tels que haras, base sous-marine, église et autres lieux insolites. 

L'artiste ensuite : David Ivar Herman Dune, désormais seul aux commandes du groupe qui porte son nom (crée avec son frère André Herman Dune aka Stanley Brinks) et qui compte une vingtaine d'albums au compteur en autant d'années d'activité. Cette tournée est un véritable évènement à plus d'un titre. Exilé aux Etats-Unis, Herman Dune se fait désormais rare en France (sa dernière tournée date d'il y a 10 ans) et chacun de ses concerts est précieux. Faut-il le rappeler, il est une référence du mouvement anti folk, multi instrumentiste, créateur de son propre Label (Santa Cruz Records), touche à tout et artiste complet dont le talent et l'inspiration semblent inépuisables. Autant de bonnes raisons qui rendent ce rendez-vous incontournable.

En ouverture de soirée Quinquis, le projet d'Emilie Tiersen accompagnée sur scène par le producteur anglais Gareth Jones, orfèvre de Some Great Reward, Black Celebration de Depeche Mode et de Turn On The Bright Lights d'Interpol pour ne citer qu'eux. Une invitation à la méditation, essentiellement en breton, où les histoires chantées sont soutenues par des voûtes électroniques travaillées avec une précision d'horloger. La génèse des textes est expliquée avec soin. On y parle de femmes, de volonté, de solidarité. L'auditoire est attentif, respectueux, comme pour mieux s'imprégner de cette ambiance assez mystérieuse et surprenante. L'identité est forte, teintée d'une spiritualité oscillant entre racines bretonnes et modernité. Après la cover Take My Breath Away, du groupe Berlin, le set s'achève sur Te, délicate déclaration d'amour d'une mère à son petit garçon. 

 

C'est sur une musique de western qu'entre en scène Herman Dune, décontracté, un verre de bière à la main pour la dernière date bretonne de sa tournée faite à l'image de son dernier album The Portable Herman Dune Vol.1 (3 volumes sont annoncés). Une tournée comme un véritable regard sur sa discographie, une rétrospective de titres dénudés, interprétés seul à la guitare sans artifices comme il aime le faire, que ce soit lors de concerts hebdomadaires sur les réseaux sociaux ou autour de chez lui à San Pedro, Californie. La salle est pleine et immédiatement enthousiaste. Les lumières chaudes des  lanternes disposées sur scènes ajoutent un effet "feu de camp" parfaitement raccord avec l' ambiance intimiste du concert. Les titres pleuvent, plus beaux les uns que les autres : Black Dog, Heart Broken & Free, My Home Is Nowhere Without You et son intro magnifique en solo flamenco, Good For No One, complainte éraillée et glaçante à vous mettre les poils et le fameux I Wish That I Could See You Soon que le public reprend en chœur. 

David Ivar profite des changements d'instruments (guitare, mandoline, harmonica) pour évoquer son amour pour la Bretagne qui l'a si bien accueilli au cours de ces dernières semaines. "Je me sens ici comme à Montréal où j'adore jouer..." Il évoque sa ballade sur le viaduc de Morlaix, ses confitures de pêches à San Pedro, Shane McGowan et la Guinness, la chanteuse canadienne Julie Doiron qu'il affectionne particulièrement : le public est totalement sous le charme, déterminé à profiter au maximum de tout ce que Herman Dune donnera ce soir. Not On Top puis Why Would That Hurt comme dernier bijou. Rappel exigé et obtenu ! Herman Dune nous offre The Anchor Song, sublime reprise de Björk que lui a inspiré sa ballade sur le port quelques instants plus tôt. Autre moment fort : Tell Me Something I Don't Know puis Holding A Monument, chanson issue de la B.O. du film Mariage à Mendoza composée par ses soins. 


Second départ et second rappel, on a bien compris que personne ne voulait le lâcher. Il le faudra bien pourtant. Après un dernier éclat sur I'd Rather Walk Than Run et You Stepped On Sticky Fingers, Herman Dune quitte la scène du Sew et nous laisse comblés, enchantés par tant d'authenticité et de poésie. Récemment, un ami me disait, en évoquant Radiohead, "Ce sont nos Pink Floyd à nous." C'est une belle formule que je reprends ici : Herman Dune est notre Dylan à nous. Pas moins à mes yeux.

Jérôme

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lundi 7 novembre 2022

Moundrag + Komodor + Komodrag & The Mounodor @ Arthémuse, 5 novembre 2022 - Briec

La soirée Heavy Rock Psyché programmée à la salle Arthémuse a tenu toutes ses promesses samedi dernier à Briec. Une séance en trois actes qui a plongé les spectateurs en plein revival 70's, de la première note jusqu'à la dernière en passant par les instrus, fringues, cheveux et rouflaquettes. Allez hop, on gare la R16 et on vous raconte.

Moundrag, c'est Camille et Colin Goellaën Duvivier, deux frangins bourrés de talent venus de Paimpol. L'un s'éclate à la batterie et aux gongs et nous gratifie de solos mémorables, l'autre maîtrise l'orgue Hammond comme John Lord et nous balance des intros à la Won't Get Fooled Again des Who. Groupe atypique, sans guitares donc, jouant une musique anachronique ou intemporelle, selon son point de vue, Moundrag ne laisse pas indifférent. Les morceaux sont inscrits dans une lignée Psyché/Progressive, on pense notamment à Tarkus de Emerson, Lake & Palmer, dont la fabuleuse pochette d'album a indéniablement inspiré celle de Hic Sunt Moundrages le premier album du groupe sorti il y a deux semaines. La complicité et le plaisir que les deux garçons prennent sur scène sont communicatifs, le public est happé ! Amusés, ils annoncent leur prochain morceau La Poule, "On vous prévient, il dure vingt minutes, on aura joué que 4 morceaux du coup !" Très bon concert !

 

Tout juste rentré d'une tournée en Espagne, Komodor était Caliente en ce samedi, pourtant bien dégueulasse niveau météo. Les Douarnenistes n'ont pas ménagé leurs efforts et ont fait vibrer les murs de l'Arthémuse à grands coups de riffs fuzzy que font résonner pas moins de trois guitares ! Postures assumées, look vintage, Komodor fait honneur au Rock de Slade (dont il font une reprise), de Golden Earring ou de Sweet. Mentions spéciales aux irrésistibles Nasty Habits, Moondrag et Washing Machine Man. Cette bande de potes s'est construit une belle réputation de scène en peu de temps et chacun de leur concert s'inscrit dans ce partage d'énergie et ce plaisir de jouer ensemble. Goudzou, à la basse, est intenable et finira dans le public, les quatre autres n'auront jamais levé le pied non plus pendant le set. Ils terminent ruisselants de sueurs, chauffés à blanc, prêts pour la 3ème mi-temps.

 

Place à Komodrag & The Mounodor. Monstre de scène venu tout droit de Paimpornez ou Douarneol, accouplement euphorisant réunissant les deux formations de la soirée. Vous suivez ? Sans ressembler à leurs groupes distinctifs, les sept zicos se jouent de tout ce que l'on entend actuellement en France. Deux batteries, trois guitares, une basse et un clavier pour un puissant Rock Heavy Boogie made in Armorica teinté d'impros. On pense à Deep Purple, Them, Uriah Heep et MC5, dont le groupe reprend Ramblin' Rose en rappel. On comprend aisément pourquoi Komodrag & The Mounodor a fait sensation aux dernières Trans Musicales. Seulement interrompu par les commandes de bières passées depuis la scène pour réhydrater nos gaillards, ce concert passe bien trop vite. Il est déjà 1h du mat, c'est l'heure de débrancher les guitares et de ranger les amplis. Briec aura eu la bonne idée de réunir les trois formations pour cette soirée concept réussie, une initiative plutôt couillue qui mérite d'être soulignée et saluée. L'album de Komodrag & The Mounodor quant à lui est annoncé pour le printemps 2023 et risque de faire du bruit, on vous aura prévenu.

 

  


Jérôme

dimanche 16 octobre 2022

BASTON + PARK @ La Carène, 14 octobre 2022 - Brest

Il pleut des cordes, y'a du vent, le temps est pourri, direction le port de co' pour être totalement raccord. Il y a du beau monde dans le grand hall de La Carène ce soir. Christophe Miossec est là, salué respectueusement par les brestois qui le reconnaissent, sans être dérangé pour autant. On aperçoit également Gaëlle, chanteuse de Beth, groupe talentueux qui œuvrait il y a plus de vingt ans déjà et dont Robin Foster a émergé. La nouvelle génération est là aussi, Victor Gobbé (Lesneu, The Slow Sliders) est venu supporter ses potes de Baston, le premier groupe de la soirée. Ce soutien constant, ce lien fort et cette fraternité entre ces artistes, sont à souligner. Si Brest n'a jamais cessé d'être féconde côté scène musicale, c'est aussi grâce à cet état d'esprit.

C'est avec les excellentes Mixtapes "Mourir à Brest" que j'ai découvert Baston. Réunissant la fine fleur du Rock de la région brestoise, on y entend Lesneu, Bantam Lyons, The Slow Sliders, Djokovic, et quelques autres. Sur ces "compilations", les groupes réarrangent leurs propres compos, de manière plutôt brute et y ajoutent des témoignages sonores qui nous plongent dans une ambiance hypnotique et urbaine. C'est gris, c'est pas spécialement beau mais tellement authentique et intense. C'est exactement dans cette mouvance que s'inscrit la musique de Baston. Sur leur album La Martyre, chaque titre évoque une boîte de nuit finistérienne, parce que oui, on va tous crever, mais on va danser avant. 

 

Sur scène, Baston est frontal, guitare réverb' qui oscille entre The Cure et Osees, basse vrombissante, batterie judicieusement mise en avant et un synthé omniprésent qui apporte une belle dimension ColdWave à la musique Garage/Psyché du groupe. Parfois cela m'a rappelé Mary Goes Round et rien que pour ça, merci à eux. Mention spéciale à Neptune et ses voix off, archives audios sur le rapport jeunesse/boîte de nuit (Y'a combien de gens qui dansent Nadège ?) et à Zodiac, autre moment fort du live. Belle reprise de Death In June, qui se mêle parfaitement au set., puis le concert se termine avec Viande, morceau saignant accompagné par la voix de Christophe Hondelatte narrant les histoires atroces extraites de "Faites entrer l'accusé". Terrible !



Assez inattendu au départ, Park est le mariage heureux et captivant de Lysistrata et de Frànçois Marry (de Frànçois & The Atlas Mountains). Le choc fructueux entre la force et l'intensité des uns avec la pop élégante et étoffée de l'autre. Un vrai tour de force à l'arrivée puisque Park ne ressemble à aucune de ses deux formations mères. Ben Amos Cooper, à la batterie, alterne le chant avec Frànçois Marry à la guitare, Théo Guéneau et Max Roy, guitare et basse, complètent le tableau, tous sur la même ligne au devant de la scène, unis comme un  seul  homme. 

 

Les chansons sont étendues et volontairement musclées par rapport à la version album. Upon A Rose, moment fort du set, qui se termine dans un déluges de décibels en est une belle démonstration. A Day Older, Réveil HeureuxGhost, les mélodies sont soignées et robustes. Les quatre garçons sont intenables et prennent un plaisir visible à se produire ensemble sur scène. Plaisir qu'ils vont partager un peu plus en faisant monter une personne du public pour jouer le "tambourineur" à leur côté sur Easy Living. Sur le dernier morceau, instrumental et puissant, Théo descend jouer dans le public et finit par laisser sa guitare à un spectateur qui se charge d'achever les festivités en faisant crisser les cordes sur le pied de micro. Sans prévenir, Park fait déjà figure de groupe solide et fait preuve d'une densité éclatante sur scène. À voir d'urgence !

 


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Jérôme

lundi 10 octobre 2022

Guadal Tejaz + Frustration @ Le Novomax, 8 octobre 2022 - Quimper

Il régnait dans le hall du Novomax une très bonne ambiance déjà avant le début des hostilités. Public nombreux (concert sold out), souriant, bavard et pressé d'en découdre avec cette programmation canon. Cold Wave et Post Punk made in France avec les bretons de Guadal Tejaz et les parisiens de Frustration, la référence en la matière depuis 20 ans. 


Guadal Tejaz ne manque pas de talent et de singularité. La voix particulière de Morgan Guillou et la puissance dégagée par leur style punk/krautrock méritent toute l'attention des afficionados du genre. Noche Triste, le second album du groupe, sort le 15 octobre et les 2 titres déjà en ligne et qui en sont issus laissent présager du tout bon. Pourtant, et assez bizarrement, je n'ai pas vraiment été convaincu par la prestation. Un brin décousu dans l'intensité, le set, peut-être encore en rodage, me laisse un peu perplexe et passe sans laisser l'empreinte attendue, malgré un final plus relevé avec notamment l'excellent Mercedeath

 

Ambiance surchauffée ensuite pour la première venue à Quimper de Frustration qui a fait honneur à son excellente réputation devant un public immédiatement conquis. Fabrice Gilbert (chant), Nicolas Duteil (guiatre), Fred Campo (synthé), Patrice Duc (basse) et Marc Adolf (batterie) sont toujours aussi bons et incisifs, faisant l'unanimité à chaque prestation. C'est hyper pro, violent sans être bourrin, puissant sans être excessif, tendu sans être froid. 


Le Novomax est survolté, même la scène est secouée et laisse apparaitre une faille sous les pieds de Pat' Duc. La set list, impeccable, qui balaie toute la discographie du groupe avec un focus logique sur So Cold Stream, le dernier album en date, mais aussi sur Uncivilized qui fête ses 10 ans cette année. Mention spéciale à Adrénaline, peu joué sur scène jusqu'à maintenant, Excess, toujours aussi explosif et à Le Grand Soir, rare titre de Frustration interprété en Français. Après un Dreams, Laws, Rights And Duties musclé, Pat' Duc et Fabrice Gilbert descendent dans le public achever l'ouvrage sur Blind.  L'osmose est parfaite et le plaisir total. Merci messieurs !


 
 

Jérôme

jeudi 29 septembre 2022

Arcade Fire @ Le Zénith, 26 septembre 2022 - Nantes

Magnifique prestation, une  fois de plus, pour Arcade Fire qui se produisait samedi soir au Zénith de Nantes. Le bonheur fut total. Depuis la belle première partie assurée par le groupe haïtien Boukman Eksperyans, jusqu'au départ de Régine, Win, Richard et les autres, traversant la foule en chantant Stand By Me a capella à l'issue d'un Wake Up toujours aussi grandiose. Retour cette superbe soirée.


Boukman Eksperyans a remplacé au pied levé Feist qui a décidé de quitter la tournée du groupe pour lequel elle assurait les premières parties. Moi qui connais la musique de Feist mais qui ignorais totalement l'existence de ce groupe, pourtant une référence en Haïti, je n'ai pu m'empêcher de me dire que nous avions largement gagné au change. Une musique métissée, des chants traditionnels, de la danse, mais surtout une présence et un dynamisme contagieux qui ont, au fil des minutes, gagné l'ensemble de la salle. Le groupe, emmené par la famille Beaubrun, dont le guitariste est désormais membre d'Arcade Fire, reviendra sur scène en fin de soirée pour participer à cette grande fête qu'ils ont admirablement amorcée.


Arcade Fire, fidèle a sa réputation Live, a encore une fois sorti le grand jeu et comblé un public nantais particulièrement réactif et enthousiaste. Le dernier album, WE, prend toute sa mesure sur scène, que ce soit sur The Lightning I et II, Age Of Anxiety ou encore sur les combos End Of The Empire. Comme à chaque fois c'est un vrai jeu de chaise musicale qui s'opère entre les morceaux, à l'image de Régine Chassagne passant de l'accordéon au piano ou de la guitare synthé à la batterie. Coté set-list c'est un vrai régal : Tunnels, Black Mirror, After Life et Reflektor d'entrée de jeu, puis un peu plus tard Rebellion, The Suburbs, Ready To Start, No Cars Go, Sprawl II pour ne citer qu'eux et bien sûr l'incontournable Everything Now. Win Butler, souriant, se prend au jeu des spectateurs en se filmant avec le téléphone de l'un d'entre eux. Régine Chassagne, charismatique et omniprésente semble plus que jamais la cheffe de tribu de cet Arcade Fire années 2020.



 

La scène et le light show, sans être trop imposants collent parfaitement au concept de la tournée. Un œil géant devant lequel des lasers multicolores sont projetés et quelques animations comme les silhouettes gonflables qui surgissent à la fin de Look Out Kid. Les spectateurs les plus éloignés ont pu apprécier également la seconde scène postée devant les gradins et sur laquelle Win tout d'abord, Régine ensuite, enfin tout le groupe, se sont rassemblés pour être au cœur de la salle et du public. Une belle communion, une grande messe accessible et généreuse, on a tout aimé de cette soirée.



Jérôme

mardi 19 juillet 2022

VIEILLES CHARRUES 2022

30 ans ! Le festival des Vieilles Charrues était bouillant pour cet anniversaire et ces retrouvailles avec ses fidèles après deux années d'annulation (même si l'année dernière les organisateurs avaient proposé une version aménagée et très réduite). Lors de la conférence de presse d'ouverture, les organisateurs, Jean-Luc Martin, Jérôme Tréhorel, Jeanne Rucet et Jean-Jacques Toux n'ont pas pas manqué de revenir sur les chiffres monstrueux du festival depuis trente ans : plus de 5 000 000 de festivaliers, près de 1 700 concerts et 7 200 bénévoles. De quoi donner le vertige. Spécialement pour cet anniversaire et pour changer du traditionnel feu d'artifice, le festival proposera chaque soir un spectacle lumineux animé par plus de 400 drones. Une prouesse technique réalisée par la start-up bordelaise Dronisos. On regrettera tout de même le manque de têtes d'affiche internationales et un grand nom "qui claque" pour marquer le coup, c'était surement dans les tuyaux au départ avec la possible venue des Rolling Stones, cela ne s'est pas fait finalement. Dommage. Cela n'a pas empêché le festival d'être complet car à Carhaix c'est la fête avant tout. 

Sur mes 3 jours de présence (jeudi, samedi et dimanche), voici ma sélection de concerts : Lulu Van Trapp, Les Têtes Raides, Lætitia Shériff & Friends, La Jungle, Last Train, Stromae, Dewære, Midnight Oil, La Battue, An'Pagay, Structures, Metronomy et Orelsan.


Il y a déjà beaucoup de monde sur le site, je pars voir Lulu Van Trapp, qui ouvre le festival sur la scène Gwernig. La disposition est atypique, le batteur, est aligné au devant de la scène comme les autres membres du groupe. Rebecca au chant n'est pas sans rappeler Catherine Ringer. Dans la voix soul/rock, dans le charisme aussi. Lulu Van Trapp joue un rock/psyché jouissif qui fait mouche auprès du public. Seul bémol, un son très perfectible surement du à l'infrastructure chapiteau. 

  

Les Têtes Raides étaient là en 2001, pour ce qui reste comme l'une des plus belles éditions du festival en terme d'ambiance et d'intensité. Christian Olivier et sa tribu, programmés en remplacement de Maxime Le Forestier, fêtent les 30 ans des Charrues mais aussi les 30 ans de Ginette, leur chanson emblématique. Les années passent mais on ne se lasse pas de GinoFragile et de Latuvu (et son snippet Voilà Voilà de Rachid Taha). Mention spéciale à Ginette bien sûr avec sa lampe qui balance au rythme des bras du public, mais aussi à cette magnifique chanson du dernier album qui s'intitule Le Frisson et qui porte bien son nom. Le rappel est superbe, Putain Putain en hommage à Arno et L'Iditenté. Not 💀 Dead !

 

 

Retour sur Gwernig pour le set de Lætitia Shériff & Friends. Très bien entourée, accrochée à sa basse, la rockeuse a livré un concert impeccable. Une vraie classe, des mélodies parfaitement construites et des morsures rock comme peu savent le faire. A l'instar de Mademoiselle K ou du Prince Miiaou (reviens !), Lætita Shériff est précieuse et trop sous-estimée dans le paysage musical français. Une scène Grall aux Charrues aurait été parfaite pour elle.


Ce concert était celui que j'avais surligné sur le programme de la journée. La Jungle, duo guitare/batterie qui joue un Transe/Rock radical a retourné Gwernig dès le premier morceau. Jim (guitare et chant) avait bien tenté de dissuader le public en entrant en scène : " Vous êtes en forme ? C'est parce que c'est le premier jour...Y'a Clara (Luciani) qui joue en même temps que nous, vous n'y allez pas ? C'est peut-être bien ? ". En vain, ceux qui étaient là savaient... Quelle énergie et quelle puissance ! Rythmes tribaux, boucles technos, guitare grunge et énorme tempo de Roxie à la batterie. Les quelques textes s'apparentent plus à des onomatopées ou à des incantations et la musique, rappelant parfois The Prodigy, est ensorcelante et irrésistible. Top concert !


Last Train remplace au pied levé Fontaines D.C. qui annule encore une fois son passage à Carhaix. Nous avons vu et chroniqué la très bonne prestation de Last Train au Festival Beauregard la semaine dernière avant le set de Muse, alors je ne vais pas radoter. C'était le 500ème concert du groupe alsacien ce soir et comme sur les 499 autres, Jean-Noël, Julien, Timothée et Antoine vont tout donner. Le temps du concert, rallongé de 15 minutes par rapport à celui de Beauregard, nous permettra entre autres d'avoir le superbe Fire

 

J'ai bien tenté de me restaurer auprès des nombreux stands présents aux quatre coins du festival... Tous étaient inaccessibles à moins de 30 à 45 minutes d'attente. A déplorer également un unique stand de nourriture végétarienne blindé de monde lui aussi... Bref, il m'a fallu attendre le début de set de Stromae à 22h30 (seul concert sur site à cette heure) pour pouvoir manger. J'ai donc assisté au concert avec 20 minutes de retard, depuis l'opposé du site. Avec les grands écrans cela n'est pas un problème. Gros show de l'artiste belge voix parfaite, charisme indéniable et une remarquable technologie en fond de scène avec de multiples bras articulés qui orientent de grands écrans différemment au gré des chansons. Impressionnant ! Au moment ou un chien robot amène son blouson à Stromae pour Papaoutai, j'aperçois un vrai chien qui slalome dans la foule à la recherche de son papa lui aussi. Les festivaliers eux, sont visiblement heureux d'être revenus aux Charrues et pas mal d'entre eux sont déjà bien "fatigués". Ce jour 1 ressemble beaucoup au jour 4 d'une édition normale. C'est bien cette bulle de bonheur, cet échappatoire où le temps s'arrête que beaucoup sont heureux retrouver. 

Retour sur la plaine de Kerampuilh après un vendredi Off. Les Charrues ne se sont pas arrêtés et ont fait la fête à Matmatah (à moins que ce soit l'inverse) qui venait pour la 6ème fois au festival. Je me positionne devant la scène Kerouac pour voir et découvrir Lous And The Yakuza mais la Pop/R'n B tendance rap de la jeune artiste belge me laisse de marbre, pas mon truc. J'en profite pour aller consulter les deux stands consacrés à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes et à la menstruation et la problématique d'avoir ses règles en festival. Information, sensibilisation et distribution de capsules de gobelets de protections périodiques gratuites entre autres. Une présence visible, un engagement indispensable et à soutenir à 100%. Bravo !




Dewære est une formation originaire de Saint-Brieuc, ville natale du grand acteur Patrick Dewære. Accompagné et soutenu par le Label Charrues (au même titre que La Battue), c'est donc le 16 juillet, jour de la mort de Patrick Dewære, que le groupe se produit sur la scène Grall du festival. Plus qu'un signe, un rendez-vous ! Une entrée en scène en chantant pour Maxwell Farrington qui me fait immédiatement penser à Mark Hollis (chanteur de Talk Talk), dans sa posture et son attitude. Sa voix, en revanche rappelle plus celle de Scott Walker ou Lee Hazelwood. Autour de lui, Julien, Franck et Marc jouent un Noisy Rock ravageur. 


Voix de crooner et guitares à fond, n'est-ce pas un peu bizarre me direz-vous ? C'est justement cette alliance de baroque et de violence qui fait de Dewære un groupe à part et totalement irrésistible. De Voilà Now You're Old, à Make It In The Morning en passant par My Shangri-Laaa et à cette fabuleuse reprise des Korgis : Everybody's Got To Learn Sometimes (méconnaissable en version punk). Le public est déchaîné, parmi eux Jean-Jacques Toux, programmateur historique du festival et dénicheur de talents avec Jeanne Rucet pour le Label Charrues, est tout sourire et peut savourer pleinement, l'éclatante réussite de ses protégés. 

 

Après cinquante ans de carrière et 13 albums studios au compteur, Midnight Oil débranche définitivement les amplis à l'issue de cette ultime tournée. Les Vieilles Charrues sont la dernière date européenne du groupe australien et il y avait logiquement beaucoup de monde pour l'évènement. Peter Garrett, "le géant vert" semble n'avoir pas pris une ride, lui qui entame sa 70ème année. Sa voix est toujours aussi atypique et imposante, le charisme est intact. La set-list est parfaite et fait la part belle à Diesel And Dust, l'album avec lequel la consécration est venue. Les moments forts sont nombreux : Put Down That WeaponThe Dead Heart, My Country, Kosciusko, Warakurna, Redneck Wonderland. 


Rob Hirst, à la batterie, n'en finit plus de jeter ses baguettes pendant et à la fin des morceaux. Il viendra présenter le groupe dans un français parfait, Peter Garrett, lui, ira même jusqu'à parler Breton, comme Bruce Springsteen ou Damon Albarn l'avaient fait avant lui sur cette scène Glenmor. Le final est grandiose avec Beds Are Burning et Forgotten Years repris en chœur par toute la plaine Kerampuilh. Midnight Oil quitte la scène sur un concert magistral, la belle histoire d'amour entre le groupe et le public français n'aura jamais failli et l'émotion était palpable. Merci Messieurs !



C'est le dernier jour du festival et la météo prévoit plus de 35°C aujourd'hui... Ça va être compliqué ! Les coins d'ombre sont chers et les tuyaux d'arrosage sont parés un peu partout sur le site et au devant des scènes. C'est le moment parfait pour la Sunshine pop de La Battue, second groupe parrainé par le Label Charrues et présenté au public sur la scène Grall. La Battue, c'est au départ Elie et Bertrand, une fratrie franco-anglaise à laquelle s'est ralliée Yuri Hu, chanteuse/claviériste d'origine Coréenne. Leur musique, composée uniquement de claviers et batterie, est positive, aérienne et très bien travaillée. 

On pense à Beach House à Laura Veirs à Sunflower Bean et au Beach Boys bien sûr tant les harmonies vocales sont maitrisées. Un bel univers musical, également graphique et où l'humour n'est jamais exclu. "On a fait un clip ou on organise des speed datings pour les chiens. On adore les chiens !" indique Elie avant Go, Set Go !. Bravo à Yuri Hu, pour l'interprétation à la flûte irlandaise de Bro Gozh Ma Zadoù, l'hymne breton, qu'elle a appris vite fait dans le fourgon en venant au festival. Excellente découverte qui confirme un très grand cru 2022 du Label Charrues.

 

Les places sous le chapiteau Gwernig étaient plus rares qu'un verre sans alcool au Bar 8. C'était, pour tous les gens venus chercher un peu de fraîcheur, l'occasion de découvrir An'Pagay et son cocktail de Funky/Jazz créole. Sept musiciens, deux batteries, un super groove addictif qui tombe à point nommé, au moment pile où, frappé par la chaleur, le coup de barre surgit. An'Pagay véritable barre d'énergie bienfaitrice.


Structures a réussi l'exploit de faire monter la température de quelques degrés supplémentaires sur la scène Grall. Le groupe originaire d'Amiens possède la noirceur d'Interpol et la violence de Rendez-Vous. Une Rough Wave autoritaire et puissante menée de front par Pierre à la guitare et au chant et Marvin à la basse. Chapeau au public qui, malgré la chaleur étouffante, n'a pas lâché une seule seconde et a su trouver les ressources nécessaires pour répondre, comme il se doit, à l'excellente prestation du groupe. Pierre, au chant, sourit face au festivaliers arrosés par la sécurité : "Allez, arrosez-moi tout ça...vous allez tout donner maintenant". Aucun répit, Structures cogne jusqu'au K.O. Mention spéciale à Satellite, Expectations, Nothing Ever Lasts, et Robbery : Brûlant !


 

Encore un petit tour du site, cette fois-ci devant le château. Grande roue et DJ Bus pour celles et ceux qui veulent s'éloigner un moment de la foule.

Une semaine après les avoir vu à Beauregard, j'assiste à nouveau au live de Metronomy. Avec 15 minutes de plus ici, c'est deux titres supplémentaires, It's Good To Be Back et Holiday, que Joseph Mount et sa bande ont ajouté à leur sélection. Assez logiquement, j'y ai trouvé quelques longueurs. L'absence de light show a joué peut-être aussi car le soleil frappait encore bien à 20 heures passées. La fin de set, avec The Look et Love Letters est toujours aussi efficace.

 

Memes tra que pour Metronomy, j'assiste au deuxième concert d'Orelsan en 8 jours. Grosse foule et grosses poussières. Des conditions compliquées qui n'ont pas découragé les festivaliers encore une fois. Super show, avec en guest les sœurs jumelles d'Ibeyi (qui jouaient un peu plus tôt sur la même scène) sur le superbe Notes Pour Plus Tard. Sur Basique, c'est Thomas N'Gijol qui vient renforcer le crew et foutre un peu plus le bordel. Ferveur énorme, ça saute, ça chante et ça danse, le nuage de poussières envahit la plaine entière...C'est du propre !

Les Charrues peuvent souffler leurs 30 bougies sereinement, les retrouvailles ont été totales avec 280 000 festivaliers au compteur. Les artistes étaient visiblement tous comblés, heureux de l'accueil et de cette folle ambiance enviée par beaucoup. Cette réussite est l'œuvre de tous : des organisateurs, des techniciens, agents de sureté, partenaires et surtout des bénévoles sans qui rien ne serait possible. Je quitte le site sous les drones en pleine action, virevoltants, bruyants comme des abeilles pour finalement s'arrêter et former un appel lumineux. Un phare pour l'édition 2023 (13>16 juillet) qui devrait voir Céline Dion se produire enfin sur Glenmor (initialement programmée en 2020).

Mon Top Vieilles Charrues 2022 (J/S/D) :

Midnight Oil, Dewaere, La Jungle, Structures, La Battue

Jérôme

PS: Toutes les photos sont ICI