mardi 19 juillet 2022

VIEILLES CHARRUES 2022

30 ans ! Le festival des Vieilles Charrues était bouillant pour cet anniversaire et ces retrouvailles avec ses fidèles après deux années d'annulation (même si l'année dernière les organisateurs avaient proposé une version aménagée et très réduite). Lors de la conférence de presse d'ouverture, les organisateurs, Jean-Luc Martin, Jérôme Tréhorel, Jeanne Rucet et Jean-Jacques Toux n'ont pas pas manqué de revenir sur les chiffres monstrueux du festival depuis trente ans : plus de 5 000 000 de festivaliers, près de 1 700 concerts et 7 200 bénévoles. De quoi donner le vertige. Spécialement pour cet anniversaire et pour changer du traditionnel feu d'artifice, le festival proposera chaque soir un spectacle lumineux animé par plus de 400 drones. Une prouesse technique réalisée par la start-up bordelaise Dronisos. On regrettera tout de même le manque de têtes d'affiche internationales et un grand nom "qui claque" pour marquer le coup, c'était surement dans les tuyaux au départ avec la possible venue des Rolling Stones, cela ne s'est pas fait finalement. Dommage. Cela n'a pas empêché le festival d'être complet car à Carhaix c'est la fête avant tout. 

Sur mes 3 jours de présence (jeudi, samedi et dimanche), voici ma sélection de concerts : Lulu Van Trapp, Les Têtes Raides, Lætitia Shériff & Friends, La Jungle, Last Train, Stromae, Dewære, Midnight Oil, La Battue, An'Pagay, Structures, Metronomy et Orelsan.


Il y a déjà beaucoup de monde sur le site, je pars voir Lulu Van Trapp, qui ouvre le festival sur la scène Gwernig. La disposition est atypique, le batteur, est aligné au devant de la scène comme les autres membres du groupe. Rebecca au chant n'est pas sans rappeler Catherine Ringer. Dans la voix soul/rock, dans le charisme aussi. Lulu Van Trapp joue un rock/psyché jouissif qui fait mouche auprès du public. Seul bémol, un son très perfectible surement du à l'infrastructure chapiteau. 

  

Les Têtes Raides étaient là en 2001, pour ce qui reste comme l'une des plus belles éditions du festival en terme d'ambiance et d'intensité. Christian Olivier et sa tribu, programmés en remplacement de Maxime Le Forestier, fêtent les 30 ans des Charrues mais aussi les 30 ans de Ginette, leur chanson emblématique. Les années passent mais on ne se lasse pas de GinoFragile et de Latuvu (et son snippet Voilà Voilà de Rachid Taha). Mention spéciale à Ginette bien sûr avec sa lampe qui balance au rythme des bras du public, mais aussi à cette magnifique chanson du dernier album qui s'intitule Le Frisson et qui porte bien son nom. Le rappel est superbe, Putain Putain en hommage à Arno et L'Iditenté. Not 💀 Dead !

 

 

Retour sur Gwernig pour le set de Lætitia Shériff & Friends. Très bien entourée, accrochée à sa basse, la rockeuse a livré un concert impeccable. Une vraie classe, des mélodies parfaitement construites et des morsures rock comme peu savent le faire. A l'instar de Mademoiselle K ou du Prince Miiaou (reviens !), Lætita Shériff est précieuse et trop sous-estimée dans le paysage musical français. Une scène Grall aux Charrues aurait été parfaite pour elle.


Ce concert était celui que j'avais surligné sur le programme de la journée. La Jungle, duo guitare/batterie qui joue un Transe/Rock radical a retourné Gwernig dès le premier morceau. Jim (guitare et chant) avait bien tenté de dissuader le public en entrant en scène : " Vous êtes en forme ? C'est parce que c'est le premier jour...Y'a Clara (Luciani) qui joue en même temps que nous, vous n'y allez pas ? C'est peut-être bien ? ". En vain, ceux qui étaient là savaient... Quelle énergie et quelle puissance ! Rythmes tribaux, boucles technos, guitare grunge et énorme tempo de Roxie à la batterie. Les quelques textes s'apparentent plus à des onomatopées ou à des incantations et la musique, rappelant parfois The Prodigy, est ensorcelante et irrésistible. Top concert !


Last Train remplace au pied levé Fontaines D.C. qui annule encore une fois son passage à Carhaix. Nous avons vu et chroniqué la très bonne prestation de Last Train au Festival Beauregard la semaine dernière avant le set de Muse, alors je ne vais pas radoter. C'était le 500ème concert du groupe alsacien ce soir et comme sur les 499 autres, Jean-Noël, Julien, Timothée et Antoine vont tout donner. Le temps du concert, rallongé de 15 minutes par rapport à celui de Beauregard, nous permettra entre autres d'avoir le superbe Fire

 

J'ai bien tenté de me restaurer auprès des nombreux stands présents aux quatre coins du festival... Tous étaient inaccessibles à moins de 30 à 45 minutes d'attente. A déplorer également un unique stand de nourriture végétarienne blindé de monde lui aussi... Bref, il m'a fallu attendre le début de set de Stromae à 22h30 (seul concert sur site à cette heure) pour pouvoir manger. J'ai donc assisté au concert avec 20 minutes de retard, depuis l'opposé du site. Avec les grands écrans cela n'est pas un problème. Gros show de l'artiste belge voix parfaite, charisme indéniable et une remarquable technologie en fond de scène avec de multiples bras articulés qui orientent de grands écrans différemment au gré des chansons. Impressionnant ! Au moment ou un chien robot amène son blouson à Stromae pour Papaoutai, j'aperçois un vrai chien qui slalome dans la foule à la recherche de son papa lui aussi. Les festivaliers eux, sont visiblement heureux d'être revenus aux Charrues et pas mal d'entre eux sont déjà bien "fatigués". Ce jour 1 ressemble beaucoup au jour 4 d'une édition normale. C'est bien cette bulle de bonheur, cet échappatoire où le temps s'arrête que beaucoup sont heureux retrouver. 

Retour sur la plaine de Kerampuilh après un vendredi Off. Les Charrues ne se sont pas arrêtés et ont fait la fête à Matmatah (à moins que ce soit l'inverse) qui venait pour la 6ème fois au festival. Je me positionne devant la scène Kerouac pour voir et découvrir Lous And The Yakuza mais la Pop/R'n B tendance rap de la jeune artiste belge me laisse de marbre, pas mon truc. J'en profite pour aller consulter les deux stands consacrés à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes et à la menstruation et la problématique d'avoir ses règles en festival. Information, sensibilisation et distribution de capsules de gobelets de protections périodiques gratuites entre autres. Une présence visible, un engagement indispensable et à soutenir à 100%. Bravo !




Dewære est une formation originaire de Saint-Brieuc, ville natale du grand acteur Patrick Dewære. Accompagné et soutenu par le Label Charrues (au même titre que La Battue), c'est donc le 16 juillet, jour de la mort de Patrick Dewære, que le groupe se produit sur la scène Grall du festival. Plus qu'un signe, un rendez-vous ! Une entrée en scène en chantant pour Maxwell Farrington qui me fait immédiatement penser à Mark Hollis (chanteur de Talk Talk), dans sa posture et son attitude. Sa voix, en revanche rappelle plus celle de Scott Walker ou Lee Hazelwood. Autour de lui, Julien, Franck et Marc jouent un Noisy Rock ravageur. 


Voix de crooner et guitares à fond, n'est-ce pas un peu bizarre me direz-vous ? C'est justement cette alliance de baroque et de violence qui fait de Dewære un groupe à part et totalement irrésistible. De Voilà Now You're Old, à Make It In The Morning en passant par My Shangri-Laaa et à cette fabuleuse reprise des Korgis : Everybody's Got To Learn Sometimes (méconnaissable en version punk). Le public est déchaîné, parmi eux Jean-Jacques Toux, programmateur historique du festival et dénicheur de talents avec Jeanne Rucet pour le Label Charrues, est tout sourire et peut savourer pleinement, l'éclatante réussite de ses protégés. 

 

Après cinquante ans de carrière et 13 albums studios au compteur, Midnight Oil débranche définitivement les amplis à l'issue de cette ultime tournée. Les Vieilles Charrues sont la dernière date européenne du groupe australien et il y avait logiquement beaucoup de monde pour l'évènement. Peter Garrett, "le géant vert" semble n'avoir pas pris une ride, lui qui entame sa 70ème année. Sa voix est toujours aussi atypique et imposante, le charisme est intact. La set-list est parfaite et fait la part belle à Diesel And Dust, l'album avec lequel la consécration est venue. Les moments forts sont nombreux : Put Down That WeaponThe Dead Heart, My Country, Kosciusko, Warakurna, Redneck Wonderland. 


Rob Hirst, à la batterie, n'en finit plus de jeter ses baguettes pendant et à la fin des morceaux. Il viendra présenter le groupe dans un français parfait, Peter Garrett, lui, ira même jusqu'à parler Breton, comme Bruce Springsteen ou Damon Albarn l'avaient fait avant lui sur cette scène Glenmor. Le final est grandiose avec Beds Are Burning et Forgotten Years repris en chœur par toute la plaine Kerampuilh. Midnight Oil quitte la scène sur un concert magistral, la belle histoire d'amour entre le groupe et le public français n'aura jamais failli et l'émotion était palpable. Merci Messieurs !



C'est le dernier jour du festival et la météo prévoit plus de 35°C aujourd'hui... Ça va être compliqué ! Les coins d'ombre sont chers et les tuyaux d'arrosage sont parés un peu partout sur le site et au devant des scènes. C'est le moment parfait pour la Sunshine pop de La Battue, second groupe parrainé par le Label Charrues et présenté au public sur la scène Grall. La Battue, c'est au départ Elie et Bertrand, une fratrie franco-anglaise à laquelle s'est ralliée Yuri Hu, chanteuse/claviériste d'origine Coréenne. Leur musique, composée uniquement de claviers et batterie, est positive, aérienne et très bien travaillée. 

On pense à Beach House à Laura Veirs à Sunflower Bean et au Beach Boys bien sûr tant les harmonies vocales sont maitrisées. Un bel univers musical, également graphique et où l'humour n'est jamais exclu. "On a fait un clip ou on organise des speed datings pour les chiens. On adore les chiens !" indique Elie avant Go, Set Go !. Bravo à Yuri Hu, pour l'interprétation à la flûte irlandaise de Bro Gozh Ma Zadoù, l'hymne breton, qu'elle a appris vite fait dans le fourgon en venant au festival. Excellente découverte qui confirme un très grand cru 2022 du Label Charrues.

 

Les places sous le chapiteau Gwernig étaient plus rares qu'un verre sans alcool au Bar 8. C'était, pour tous les gens venus chercher un peu de fraîcheur, l'occasion de découvrir An'Pagay et son cocktail de Funky/Jazz créole. Sept musiciens, deux batteries, un super groove addictif qui tombe à point nommé, au moment pile où, frappé par la chaleur, le coup de barre surgit. An'Pagay véritable barre d'énergie bienfaitrice.


Structures a réussi l'exploit de faire monter la température de quelques degrés supplémentaires sur la scène Grall. Le groupe originaire d'Amiens possède la noirceur d'Interpol et la violence de Rendez-Vous. Une Rough Wave autoritaire et puissante menée de front par Pierre à la guitare et au chant et Marvin à la basse. Chapeau au public qui, malgré la chaleur étouffante, n'a pas lâché une seule seconde et a su trouver les ressources nécessaires pour répondre, comme il se doit, à l'excellente prestation du groupe. Pierre, au chant, sourit face au festivaliers arrosés par la sécurité : "Allez, arrosez-moi tout ça...vous allez tout donner maintenant". Aucun répit, Structures cogne jusqu'au K.O. Mention spéciale à Satellite, Expectations, Nothing Ever Lasts, et Robbery : Brûlant !


 

Encore un petit tour du site, cette fois-ci devant le château. Grande roue et DJ Bus pour celles et ceux qui veulent s'éloigner un moment de la foule.

Une semaine après les avoir vu à Beauregard, j'assiste à nouveau au live de Metronomy. Avec 15 minutes de plus ici, c'est deux titres supplémentaires, It's Good To Be Back et Holiday, que Joseph Mount et sa bande ont ajouté à leur sélection. Assez logiquement, j'y ai trouvé quelques longueurs. L'absence de light show a joué peut-être aussi car le soleil frappait encore bien à 20 heures passées. La fin de set, avec The Look et Love Letters est toujours aussi efficace.

 

Memes tra que pour Metronomy, j'assiste au deuxième concert d'Orelsan en 8 jours. Grosse foule et grosses poussières. Des conditions compliquées qui n'ont pas découragé les festivaliers encore une fois. Super show, avec en guest les sœurs jumelles d'Ibeyi (qui jouaient un peu plus tôt sur la même scène) sur le superbe Notes Pour Plus Tard. Sur Basique, c'est Thomas N'Gijol qui vient renforcer le crew et foutre un peu plus le bordel. Ferveur énorme, ça saute, ça chante et ça danse, le nuage de poussières envahit la plaine entière...C'est du propre !

Les Charrues peuvent souffler leurs 30 bougies sereinement, les retrouvailles ont été totales avec 280 000 festivaliers au compteur. Les artistes étaient visiblement tous comblés, heureux de l'accueil et de cette folle ambiance enviée par beaucoup. Cette réussite est l'œuvre de tous : des organisateurs, des techniciens, agents de sureté, partenaires et surtout des bénévoles sans qui rien ne serait possible. Je quitte le site sous les drones en pleine action, virevoltants, bruyants comme des abeilles pour finalement s'arrêter et former un appel lumineux. Un phare pour l'édition 2023 (13>16 juillet) qui devrait voir Céline Dion se produire enfin sur Glenmor (initialement programmée en 2020).

Mon Top Vieilles Charrues 2022 (J/S/D) :

Midnight Oil, Dewaere, La Jungle, Structures, La Battue

Jérôme

PS: Toutes les photos sont ICI

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