Quelques jours seulement après la sortie de leur 8ème album intitulé The Blue Hour, Suede est déjà en tournée européenne avec pour seule escale française, le cadre intimiste de La Cigale à Paris. L'occasion était belle de vérifier, dans les meilleures conditions possibles, les très bonnes sensations perçues suite à l'écoute sur la platine de ce dernier opus.
C'est GWENNO qui assurait la première partie. Après une timide entrée en matière, on se laisse facilement porté par l'ambiance aérienne et le chant celte de la galloise. Quelque part entre Enya et Florence Welsh (Florence & The Machine), on est loin, bien loin du doo-wop des Pipettes dont Gwenno faisait partie.
Depuis leur re-formation en 2010 (suite à une pause de 6 ans), Brett Anderson et sa bande semblent débarrassés de toute pression. Les 3 albums qui ont suivi cette pause salvatrice sont plus matures, moins accessibles mais aussi plus ambitieux. Suede ne cherche plus à plaire au plus grand nombre mais juste à être raccord avec son temps et son karma. Cette attitude assumée leur a tout simplement permis de continuer sans tomber dans la médiocrité et la facilité. Les chansons ont gagné en profondeur, en noirceur aussi. Suede a pris du recul, faisant clairement passer l'œuvre avant le groupe, en témoignent les derniers clips produits tels des longs métrages, sans plus aucune présence physique des membres du groupe et mettant parfois en scène des personnages "perdus" dans une ambiance froide et inquiétante. Paradoxalement (et heureusement) ce concert sera tout sauf froid et inquiétant !
Pour aller au bout du concept, c'est derrière un voile que Suede débute le set sur As One. Pourquoi pas ? La chanson, qui ouvre également l'album The Blue Hour est une parfaite intro. Mais ce sont finalement 3 titres qui seront interprétés derrière cette "barrière". Plutôt que de créer une ambiance, ce voile, très dispensable, génère de la frustration, quand sur le dynamique morceau Wastelands, on ne fait qu'apercevoir la prestation. Bof.
Enfin le voile s'écarte et le show peut vraiment commencer. Dans la continuité de ce début de set post 2010, Outsiders et Cold Hands sont joués. Brett Anderson, fait le show, saute sur les retours, danse d'un bout à l'autre de la scène, se précipite au contact des fans des premiers rangs. Des fans "hardcore" très très tactiles qui n'hésitent pas à déboutonner la chemise de leur idole et le couvrir de caresses lorsque celui-ci leur implore au micro "Put Your Cold Hands On Me...". L'enchaînement est sans temps mort, The Drowners et So Young nous renvoient plus de 25 ans en arrière. Brett Anderson est intenable et déjà complètement trempé de sueur. Le contraste est saisissant entre le frontman de 51 ans, qui franchement donne tout, et le reste du groupe plutôt discret. Simon Gilbert est caché derrière sa batterie, Neil Codling est tellement inexpressif et nonchalant qu'il ferait passer Larry Mullen Jr, le batteur de U2, pour un gros bout-en-train. Seuls Matt Osman à la basse et Richard Oakes à la guitare (très amaigri) se risquent à quelques avancées au devant de la scène dès que leur chanteur la quitte pour prendre son bain de foule. Sitôt que celui revient, ils prennent 1 ou 2 mètres de recul, laissant toute la place à leur charismatique leader. Je crois surtout qu'ils ne veulent pas prendre le micro en pleine poire lorsque Brett Anderson le fait tournoyer au bout de son câble telle une fronde. En tout cas, musicalement, c'est parfait !
Petite accalmie avec deux nouveaux morceaux : le somptueux Tides suivi de RoadKill, un texte parlé par Brett Anderson seul sur scène. Puis résonnent les premières notes d'un monument de la discographie du groupe : The Asphalt World. Peu jouée en tournée et reçue comme un cadeau ce soir, cette sombre ballade psyché de 9 minutes est l'un des grands morceaux de Dog Man Star, le second opus de Suede. Le public ne s'y trompe pas et ovationne le groupe après cette performance. Un vrai bonheur. Après cette superbe envolée, retour au speed avec, coup sur coup, Filmstar, Metal Mickey, Trash et Animal Nitrate. De quoi finir d'enflammer toute La Cigale.
Le groupe quitte la scène laissant Brett Anderson seul à la guitare pour un titre en version acoustique. Il ajoute que chaque soir de la tournée il joue de cette façon un morceau différent, notamment pour les fans qui suivent le groupe sur plusieurs dates. Ce soir ce sera The Big Time. Il est à souligner que depuis le début de cette tournée, Suede a le bon goût de varier environ 1/4 de sa set-list. Petit détail qui est toujours très appréciable pour ceux qui font plusieurs dates. Après The Invisibles, le concert s'achève sur le très beau Flytipping, titre qui clôture également le dernier album du groupe.
En rappel Suede revient avec Beautiful Ones, lui aussi repris en cœur par un public totalement comblé devant un Brett Anderson incroyable de présence et bluffant d'énergie.
Suede était bel et bien au rendez-vous. Brett Anderson était partout. Superbe prestation !
Toutes les photos du concert ICI
Jérôme
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